Skip to main content
PublicationsMédias

Les PME, ce réservoir de croissance inexploité

By 12 mars 2025No Comments

Tribune publiée le 12 mars 2025 dans Les Echos

Plutôt que de courir après des licornes, très rares, la France devrait soutenir les PME rentables qui investissent massivement. Le cadre fiscal doit être adapté à leur croissance, plaide Eric Bismuth, président de Montefiore Investment.

Alors que le gouvernement s’attache à contenir le déficit public, il apparaît plus que jamais essentiel de promouvoir une politique favorisant la croissance pour pérenniser notre modèle social. Celle-ci ne viendra pas d’une nouvelle relance de la consommation, qui continuerait à favoriser les importations et creuser nos déséquilibres, mais du développement de nos entreprises.

S’il est compréhensible que les grandes entreprises concentrent l’attention du fait de leur poids et de leur rôle dans le rayonnement international de la France, nos PME et ETI constituent le véritable poumon économique du pays, représentant 40 % des investissements, plus de 50 % de la valeur ajoutée et 75 % des emplois. Faut-il rappeler qu’elles contribuent à plus de 100 % de la création nette d’emplois en France ?

Surfiscalisation du travail

Or, lorsque l’on compare le tissu d’entreprises françaises aux autres pays européens, nos PME et ETI restent moins rentables que celles de nos voisins. Cet écart provient principalement des charges et prélèvements affectant les salaires, essentiellement pour les emplois qualifiés. Une étude récente de Rexecode confirme que la France se distingue par la surfiscalisation croissante du travail pour les rémunérations supérieures à 1,4 SMIC, ce qui creuse l’écart de compétitivité et contribue aux délocalisations des emplois à forte valeur ajoutée.

Il faudra bien traiter ce sujet, en acceptant que, après avoir privilégié pendant des décennies le consommateur et le retraité, la stratégie économique poursuive le rééquilibrage engagé depuis dix ans vers le travailleur et le producteur.

Par ailleurs, si nos ETI sont moins nombreuses, c’est parce que nous avons moins de PME capables de se développer durablement à un rythme de 10 % de croissance par an au moins. Il y en a environ 15.000 en France, soit moins de 8 % des entreprises de plus de 10 salariés. Dans les autres pays européens, ce chiffre s’élève à 11 % et, partout, ces entreprises sont responsables d’environ 50 % de la création brute d’emplois.

La rentabilité, un préalable à la croissance

Ces entreprises, contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas des start-up, mais des sociétés ayant entre cinq et vingt ans d’âge. Surtout, elles investissent beaucoup plus. Deux chercheuses françaises, Cyrine Ben-Hafaïedh et Anaïs Hamelin, ont confirmé dans une étude récente que, dans l’immense majorité des cas, la rentabilité est un préalable à la croissance forte et durable, alors que la croissance sans rentabilité conduit très rarement à un modèle profitable.

Le modèle de « la chasse à la licorne » ne doit donc être réservé qu’aux rares entreprises pouvant créer des quasi-monopoles dans des métiers à barrières stratégiques très élevées. Dans toutes les autres situations, c’est le modèle de la PME rentable qui investit massivement qu’il convient de privilégier.

Il s’agit donc d’encourager leur financement, mais aussi leur transmission, à un moment où nombre de dirigeants vont partir à la retraite, avec le risque que les plus belles rejoignent des groupes étrangers. Pour que le capital-investissement français puisse apporter sa pleine contribution, un cadre fiscal attractif pour l’actionnariat des salariés et l’association à la création de valeur des dirigeants preneurs de risques est primordial.

Si un effort de maîtrise des dépenses publiques est indispensable, celui-ci ne se réalisera pas sans rebond durable de la croissance rentable de nos entreprises, PME et ETI. On ne crée pas d’emplois sans rentabilité élevée, condition sine qua non d’investissements soutenus. Et on n’investit pas sans cadre social et fiscal pérenne. La sauvegarde du modèle social français est aussi à ce prix.

par Eric BISMUTH
Président